Comment la pleine présence peut nous aider à naviguer à travers le risque du coronavirus

Votre pratique de la pleine présence peut non seulement aider à diminuer la peur et l'incertitude liées au COVID-19, mais peut aussi vous aider à arrêter de vous toucher le visage toute la journée...

Chaque jour, les médias nous donnent des nouvelles sur le coronavirus et les actions à mettre en œuvre pour ne pas tomber malade. Les écoles et beaucoup de lieux publics sont maintenant fermés. Les projets de voyages, de conférences et autres sont annulées. Des pénuries sont visibles dans les supermarchés, des conserves au papier toilette. Les marchés boursiers s’effondrent…

Plus que le virus lui-même, c’est l’incertitude qui cause la peur. Mais cela doit nous rappeler pourquoi nous pratiquons la méditation.

Cela fait maintenant quelques semaines, quelques mois ou quelques années que l’on vous dit que la pratique assise est un entraînement pour mieux vivre les situations de crise, de peur et d’émotions intenses. Eh bien, c’est maintenant le moment de mettre ce que nous avons appris en pratique ! La situation liée au COVID-19 évolue chaque jour et nous en avons peut-être pour des semaines voire des mois avant un retour complet à la « normale ».

Il peut nous arriver de penser que la méditation c’est bien mais que cela nous apporte peu en dehors d’un peu de bien-être. Mais la pleine présence est faite pour la difficulté et l’incertitude. C’est comme les 4×4 : ils peuvent certes circuler en ville, mais ils ne sont pas faits pour cela et sont vraiment utile en terrain accidenté et boueux et c’est là qu’ils nous gardent vraiment sur le chemin sans nous embourber ni nous accidenter.

Récemment, je me suis rendu compte de la corrélation directe entre ce que je lisais et entendais aux informations et mon état intérieur. En sortant de chez moi vendredi, je me suis rendu compte que j’appréhendai tout contact avec d’autres personnes, ou que j’avais peur de toucher une poignée de porte ou un écran tactile pour acheter mon ticket de bus… Et puis en fait il m’a suffi de me laver les mains avec un peu de gel hydroalcoolique pour que ça passe.

Nous pouvons utiliser la pleine présence pour nous aider à calmer notre agitation et nos peurs. Regardez l’impact qu’ont sur vous et votre état émotionnel les nouvelles à la télévision ou sur internet, les discussions dans une réunion de famille ou au travail. Est-ce que vous avez soudain une furieuse envie de vous rendre au Monop’ du coin et d’y dévaliser le rayon de papier toilettes ? Pensez-vous que la seule solution est de vous exiler loin de tout et de vous calfeutrer chez vous ?

Quelle que soit la peur qui émerge — qu’elle soit liée à un mystérieux virus ou non d’ailleurs — nous pouvons faire une pause et ressentir ce qui est là présent en nous. Nous pouvons voir que nos sensations ne sont pas monolithiques et varient avec le temps et sont plus complexes que nous le pensons, un mix de sensations, d’images, de pensées, etc.

En faisant cela et en pratiquant avec ce que l’on ressent (cf. la pratique avec les émotions en 3 étapes) nous pouvons progressivement calmer nos émotions et notre agitation et voir plus clairement la part de nos projections et ainsi regagner en clarté et en discernement.

Quand on quitte ainsi la peur grâce à la pratique, elle devient plus fonctionnelle. Elle peut même nous informer des prochaines étapes et choses à faire. Ressentir dans l’inconfort de l’incertitude peut donner naissance à de nouvelles perspectives et nous donner la flexibilité mentale de reconsidérer nos opinions et agir avec responsabilité au milieu de la tourmente.

Pleine présence
et coronavirus

La pleine présence peut aussi aider très directement à combattre le coronavirus.

Nous pouvons aussi nous rendre compte, par exemple, le nombre de fois dans une journée que nous nous touchons le visage et la bouche. Il paraît qu’on le fait en moyenne plus de vingt fois par heure. Malheureusement, c’est le moyen le plus sûr d’attraper le coronavirus car le visage est le plus sensible à la pénétration du virus et la partie la plus proche des zones où il va se nicher : voies nasales et buccales notamment.

Ne pas se toucher le visage peut devenir une pratique en soi d’attention au corps. Quand cela nous grattouille ou quand cela nous chatouille : petite pause, ressentir et laisser passer. Si vous portez un masque, vous verrez plus directement combien de fois vos mains entrent en contact avec votre visage et cela peut être une barrière efficace et un rappel à la présence. Bien sûr cela ne remplace pas l’hygiène des mains mais cela aide directement à ne pas être touché par le virus.

Au lieu de nous serrer la main et de nous embrasser nous pouvons nous saluer à la japonaise ou à l’indienne en baissant le buste ou en joignant les mains en anjali. Nous montrons par ce geste notre respect et notre bienveillance envers l’autre, que nous prenons soin de santé et de son intégrité en évitant d’être un facteur infectieux.

Comme les chinois ont écrit sur les caisses d’aide médicale qu’ils viennent d’envoyer en Italie :
Nous sommes les vagues d'une même mer, les feuilles d'un même arbre

Sénèque

Cette crise du coronavirus nous montre à quel point nous sommes interdépendants et interconnectés. On ne peut pas dans de telles circonstances penser uniquement à soi et chacun de nos actes, nous ramène à notre responsabilité universelle. On peut-être un porteur sain du virus et nous ne pouvons pas faire comme cela n’était pas notre affaire car nous ne serions pas dans la population à risque. Nous sommes responsables du bien-être et de la santé des autres et de chacun. Il n’a jamais été aussi facile de sauver des vies.

Enfin, au-delà de cette crise, la complexité de nos sociétés post-modernes a atteint un niveau inégalé de fragilité. Un pangolin et une chauve-souris peut mettre par terre en une semaine tout notre mode de vie, de manière plus puissante que le terrorisme ou les révolutions.

Il est grand temps de repenser nos modes de vie, nos attentes, nos désirs égoïstes, notre consommation effrénée et de revenir à un peu de simplicité et d’enracinement. Avant d’être des consommateurs d’un marché mondial, nous sommes des membres de communautés locales, de territoires et de terroirs qui souffrent depuis des décennies de la globalisation marchande et financière. Réapprenons les circuits courts, la simplicité et le contentement. Redécouvrons nos pays plutôt que d’aller visiter l’autre bout du monde en vacances. Recréons des systèmes humains anti-fragiles parce qu’enracinés et locaux. Ce que la finance y perdra, nos vies y gagneront en richesses et en profondeur.